Dimanche 9 octobre 2022 – Homélie

Homélie

  28ème dimanche du Temps Ordinaire — Année C  

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Homélie du père Olivier Lebouteux

De l’exclusion à la gratitude

Revendiquer ses « droits », les rappeler souvent, c’est quelque chose que nous connaissons bien dans notre monde. Nous sommes immergés dans un monde de droits et de devoirs, et bien souvent on pense plus souvent à ses droits qu’à ses devoirs.

Mais avec Dieu il n’en est pas ainsi, et c’est même dangereux pour nous quand on commence à se dire : « maintenant je suis en règle avec Dieu [avec tout ce que j’ai fait pour Lui], donc j’ai « droit » à telle ou telle grâce de Sa part. Car dans l’évangile il n’est jamais question de « droits » du croyant envers son Dieu, mais plutôt de gratuité et de « gratitude ». Si bien que chercher à revendiquer ses droits auprès de Dieu, c’est s’exposer à être certainement déçu !

Au temps de Jésus, dès qu’on était atteint de lèpre, on n’avait plus du tout accès au Temple, donc [puisqu’on croyait que c’était le seul lieu de Sa présence], on n’avait plus d’accès à Lui pour Le prier ! Dans ce récit, Jésus se trouve entre la Judée [territoire juif] et la Samarie [considéré comme un territoire étranger], et parmi les 10 lépreux qui sont venus Le supplier de les guérir, un Samaritain s’est introduit. Au début de l’évangile selon Saint Luc, Jésus guérit un lépreux, on peut donc imaginer que ces 10 hommes avaient entendu dire que Jésus avait le pouvoir de guérir de la lèpre.

« Jésus, Maître, prends pitié de nous » : sur cette supplication, Jésus leur donne un ordre bien surprenant : se montrer au prêtre – seul habilité à constater leur guérison – alors que pour le moment ils ne sont pas du tout guéris ! Mais chemin faisant, l’un d’eux, constatant qu’il est guéri, rebrousse chemin vers Jésus. On apprend peu après que cet homme est samaritain [donc aller voir le prêtre juif n’a pas beaucoup de sens pour lui], mais ce n’est pas cela que Jésus veut mettre en lumière, mais son attitude de reconnaisse et d’action de grâce. Lui aussi a fait confiance en la parole de Jésus, même s’il n’avait pas la foi juive ; si Jésus fait remarquer que c’est un étranger, c’est pour souligner qu’il ne s’est pas dit en tant que Samaritain : je n’ai pas « droit » à cette guérison.

Notons bien que – puisque Jésus le dit – que les 10 hommes ont été guéris, et que ces guérisons ont été accomplies dans le cadre d’une démarche rituelle. A travers les rites que nous sommes invités à vivre, Dieu nous communique sa grâce.  Mais veillons bien à ne pas nous contenter d’aller à la messe seulement par devoir ou par habitude, car il manquerait alors une dimension essentielle de ce que nous vivons chaque semaine : remercier le Seigneur de tout ce que nous avons reçu durant la semaine.

Eucharistie, c’est un mot grec qui signifie « action de grâce ». Nous sommes invités à aller à la messe pour rendre grâce pour tous les dons du Seigneur à notre égard. Rendre grâce à Dieu, n’est-ce pas nous rappeler qu’Il est source de tout bien. N’attendons pas la messe dominicale pour rendre grâce : remplissons nos journées d’actions de grâces que nous récapitulerons lors de « l’eucharistie » !.

Sans action de grâce fréquente, on ne remarque plus du tout ce qu’on a reçu de Dieu. Et plus nous Lui rendons grâce, plus nous ouvrons les yeux sur Ses dons. Sinon, nous ne les remarquerons que le jour où ils viendront à manquer !

Prendre conscience de tous les dons que nous avons reçu va aussi nous donner envie d’en redonner autour de nous, mais à la base de tout cela il ne faut pas se sentir indigne de recevoir des dons du Seigneur et d’en «profiter ».

Mais sans attendre cela, dès lors qu’on entre résolument dans cette démarche d’action de grâce, on est dans une grande joie, et on a un cœur dilaté, qui se rend compte que Dieu l’aime, toujours davantage. [Très loin d’une attitude où tout nous serait dû] nous découvrons alors que tout nous est donné ; la terre, le ciel, le soleil, l’eau… non pas pour nous l’approprier, mais pour le recevoir dans la joie, tous les jours de notre vie. Saint François d’Assise dans sa pauvreté prenait conscience que tous les dons de la Création lui étaient donnés gratuitement. Son cantique de la Création en est la plus belle expression.

Que cet évangile nous fasse réaliser tout ce que Dieu nous a donné, et que cette messe se révèle pour chacun de nous être une action de grâce extraordinaire, et que d’une messe à l’autre nous recevions des dons toujours plus grands ! Qu’Il remplisse notre cœur pour que nous redonnions toujours plus de Ses dons au monde, et que nous soyons toujours plus dans l’action de grâce jusqu’à l’éternité, Amen.