« Père », l’adoration du vrai Dieu : le Père « qui es aux cieux »

Cycle de CATÉCHÈSE SUIVIE SUR LE NOTRE PÈRE

« Notre Dieu, il est au ciel ;
tout ce qu’il veut, il le fait. »
Ps 113B,3

Oui, Dieu est Dieu, et ainsi il est vraiment partout, à tout moment, en toute chose, dans toute situation et événement. Mais Dieu est « aux cieux. » Dieu est aux cieux, car il a beau être partout, son être est unique. Les cieux, en effet, désignent le mode unique selon lequel Dieu est, le mode unique selon lequel Dieu avec lui-même. Le ciel dit son inaccessibilité, la liberté dans laquelle il est seul, pleinement avec lui-même comme Celui qui est. Les cieux, c’est cette vie sainte, pure, paisible, belle, intime, bienheureuse. Ce n’est pas là une simple vision esthétique, c’est ce à quoi aspire notre cœur, et notre âme, ce mode d’être divin qui diffère du nôtre, cette demeure éternelle, qui est pourtant notre patrie. Dire « Notre Père qui es au cieux » signifie donc, que certes nous devons partir de ce que nous sommes, de tout lieu, tout temps, toute situation pour nous adresser à Dieu et le toucher, mais lorsque nous nous adressons à Dieu nous devons accepter aussi sa liberté, son mode d’être unique, accepter qu’il n’est pas semblable aux choses, aux temps, à nous-mêmes. Nous ne lui prescrivons pas ce qu’il doit être mais nous consentons à ce qu’Il soit lui-même. Nous le voulons selon lui-même, non pas selon nous. Nous acceptons par avance qu’Il ne soit pas selon notre attente, mais demeurant mystérieux et inconnu, selon lui-même, car c’est seulement en Lui, tel qu’Il est et non pas tel que nous le voulons, que notre cœur peut trouver le repos.
Nous ne voulons pas d’un Dieu tel que nous pouvons nous le représenter à partir de la terre, un Dieu identifié à l’homme, au monde. Nous voulons le Dieu qui a dit : « Je suis qui je suis ». Nous voulons trouver le vrai Dieu, Lui seul.

Cette formule « qui es aux cieux » ou « céleste » – chère à Matthieu qui l’utilise pas moins de quinze fois dans le sermon sur la montagne au cœur duquel on trouve le Notre Père – unit le respect pour la transcendance de Dieu et le sens de l’intimité. Elle ne dit donc pas un lieu différent ou ailleurs mais un être différent. C’est une manière d’opposer le Père céleste aux pères de la terre (Mt 7,9-11).
La bonté apparaît comme le trait distinctif du Père céleste, bonté qui fonde la confiance par laquelle nous pouvons le prier. Dieu est le Père bienveillant qui fait luire son soleil sur bons et méchants (Mt 5,45), celui dont la perfection doit servir de norme à la conduite de ses enfants (Mt 5,48). Il voit dans le secret (Mt 6,4.6,18), est attentif aux besoins des moindres de ses créatures (Mt 6,26sv).
Ce Père bon auquel il nous faut ressembler pour être fils est Celui qui est aux cieux. Ainsi même en sa bonté qui le rend proche, il nous est impossible de mettre la main sur lui. Au contraire, la mention des cieux nous renvoie bien plutôt à l’attitude d’adoration et de louange qui s’exprime dans la grandiose liturgie du Ciel. Jésus lui-même nous parle des anges qui se tiennent sans cesse en présence de son Père qui est aux cieux (Mt 18,10)

Soyons donc vigilant à ne pas mettre la main sur Dieu, qui alors deviendrait une idole. Soyons vigilant à accepter que Dieu se donne comme Il le veut et non comme nous le voudrions, même si cela est inconfortable pour nous et nos désirs, afin que notre prière nous ouvre au vrai Dieu. Soyons vigilant à ne pas nous préserver de cet inconfort, à ne pas nous protéger de Dieu et de ce que la rencontre avec le vrai Dieu pourrait bouleverser dans nos vies et nos désirs, en projetant sur lui notre propre image, de sorte que dans la prière nous finirions par ne plus parler qu’à nous-mêmes. Nous chrétiens, n’avons pas peur de faire entrer Dieu dans notre vie, n’avons pas peur de l’inquiétude que nous provoque son absence et son mystère. Nous ne craignons pas cela parce que Notre Dieu a voulu que nous l’appelions Notre Père. En priant le Père des cieux, nous reconnaissons aussi où se trouve la paternité véritable, où se trouve la source de notre vie. Nous comprenons ainsi que notre demeure véritable se trouve dans les cieux et c’est vers elle que nous tournons nos cœurs, car c’est en elle que nous sommes vraiment fils.

Père Ambroise Riché