«Je n’ai pas besoin de toi» – Edito 2017 n°2

De même que « l’oeil ne peut pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi » ; ni la tête ne peut dire aux pieds : « « Je n’ai pas besoin de vous », aucun d’entre nous ne peut prétendre mener sa vie chrétienne seul et marcher seul vers le Christ. Il nous faut donc avoir un souci du Corps tout entier, car de la santé du Corps, dépend aussi notre santé. Ce souci, dont le moteur est la charité, passe par ce qu’on appelle la correction fraternelle. Voilà l’invitation que le Seigneur nous adresse dans Sa Parole en ce début d’année : « Ayez le courage de corriger vos frères. »

Nous le savons, cet exercice est toujours difficile, et il est rendu d’autant plus difficile de nos jours, que notre monde, d’une part nous conduit au relativisme du « chacun son propre bien » et donc « pas de jugement », et d’autre part nous invite à nous replier sur nous-mêmes, à cultiver l’égocentrisme et l’égoïsme. C’est la « mondialisation de l’indifférence » dont parle tant notre pape François. Nous craignons aussi d’exercer la correction fraternelle pour éviter toute tension, qui impliquerait de notre part un engagement supplémentaire de charité pour maintenir la communion fraternelle. Nous préférons alors souvent la tranquillité de relations courtoises.

En réalité, aucune correction fraternelle n’est vraiment possible sans avoir fait de celui que je corrige un frère, sans avoir au préalable exercé à son endroit une vraie charité, par laquelle j’ai pris soin de lui comme d’un membre de mon propre corps. En effet l’absence de correction fraternelle est bien souvent le symptôme d’une absence de véritables relations tout court.

L’invitation est donc double en ce début d’année. Fortifions nos relations par une vraie charité, en allant par exemple vers ceux que nous ne connaissons pas, en accueillant vraiment ceux qui rejoignent notre communauté. Et dans cette charité, ayons le courage de nous corriger mutuellement. Exerçons et formons notre conscience et notre intelligence à reconnaître le Bien, exerçons notre cœur et notre volonté à le promouvoir et à le défendre pour nous-mêmes et pour nos frères. Aimons-nous d’un amour sincère, corrigeons-nous fraternellement. Nous serons ainsi chacun pour tous un marchepied vers le Ciel.

Abbé Ambroise Riché